24.09.05

Samedi 24 septembre

Dans quel monde vivons-nous ?

2 adolescentes de 14 ans ont répondu de la plus tragique des manières en se jetant hier après-midi du 17ème étage d’une tour située près de Paris, à Ivry-sur-Seine.

Dans quel monde vivons-nous ?

L’une d’elles aurait laissé une lettre dans laquelle elle expliquait que la vie, sa vie, ne valait pas la peine d’être vécue…

Cela me rappelle un de mes meilleurs amis d’enfance, Rainer, qui avait 3 ans de plus que moi et que je regardais vivre comme un héros. A 14 ans, il était sûr de lui, il osait parler aux filles, il les embrassait même !

Il était vraiment gentil avec moi et me parlait d’égal à égal, allant jusqu’à demander à ses copines si elles n’avaient pas une amie qui voudrait sortir « avec le petit », il y en eut quelques unes…

Il habitait en face de chez moi, j’y allais souvent. Il me faisait écouter de la musique qui aurait été classée par mes parents, dans le meilleur des cas, comme « décadente », genre Deep Purple, Led Zeppelin ou Pink Floyd (Qui pour mémoire ont sorti « Dark Side of the Moon » en 1973, j’avais 12 ans, on en reste marqué…).

Rainer était l’adolescent que j’aurais aimé devenir, autonome, décidé, « cool » comme on aurait dit il y a quelques années. Il représentait le grand frère que je n’avais pas eu.

Et puis un jour…

Ma mère est venue vers moi, elle était visiblement gênée, ne sachant pas comment me « le » dire. « Ton ami Rainer a eu un accident ! ». « Rainer, un accident ? Mais comment ? ». « Je ne sais pas mais… ». « Mais quoi, c’est grave ? ». Ma mère a fait signe que oui avec la tête et je me suis mis à pleurer car j’avais compris que c’était très très grave.

Aucun adulte ne m’a dit la vérité, c’est un copain d’école qui m’a donné l’invraisemblable nouvelle, Rainer s’était suicidé en laissant un courrier dans lequel il a expliqué que cette vie ne valait pas la peine d’être vécue…

Je l’avais fréquenté quotidiennement pendant des années, je lui avais parlé pendant des heures, jamais je n’aurais pu imaginer que de tels sentiments l’envahissaient, jamais.

Il ne m’a laissé aucun mot, aucune explication, rien. Aux derniers et si sombres instants de sa vie, je n’étais pas présent… Mais lui n’a jamais quitté la mienne et ne la quittera jamais, il restera le grand frère que je n’ai jamais eu.

Dans quel monde vivons-nous ?

Le quartier de Monmousseau d’Ivry-sur-Seine, lieu de la tragique disparition de ces 2 jeunes filles de 14 ans, va organiser demain, dimanche 25 septembre, sa fête annuelle avec des animations pour les enfants, des jeux vidéos, un tournoi de foot, un apéritif et un déjeuner dansant.

Exactement comme moi avec Rainer, ils vivent dans une autre galaxie que ses malheureuses et préparaient une fête pendant qu’elles planifiaient leur mort.

Alors que des structures d’aide existent partout, notamment à Ivry-sur-Seine (http://www.ivry94.fr/web/2155.htm), comment faire pour qu’elles représentent une alternative crédible à une pulsion suicidaire ?

Nous avons l’obligation de nous remettre en question, d’oser regarder en face notre société et ses modes de fonctionnement car le suicide des jeunes, en perpétuelle augmentation, est inacceptable. Comment un adolescent peut-il penser que sa vie ne vaut pas la peine d’être vécue alors qu’elle sera ce qu’il en fera ? Et qu’il peut en faire ce qu’il veut puisque la page est blanche !

Le formatage à marche forcée dans lequel nos pays « développés » se sont engagés, et s’enfoncent au rythme de la mondialisation, est un risque majeur pour l’avenir de nos enfants.

Nous sommes tous différents et ce sont justement ces particularités qui font la richesse d’une société ; alors que le laminoir actuel éjecte tous ceux qui ne fonctionnent pas selon le règlement 26B, alinéa 3, de la circulaire du 12 janvier 1998, révisée le 14 octobre 2004…

Ce monde de l’argent, de l’égoïsme, du paraître et de l’instantanéité est un leurre qui tue plus de 1'000 adolescents en France chaque année et ce chiffre est proportionnellement le même dans tous les pays « civilisés ».

Le suicide tue plus que les accidents de la route dont on entend parler, à juste titre, tous les jours mais pourquoi ce silence et cette inaction rampante envers ce fléau grandissant.

Sachez que l’on se tue beaucoup moins dans les pays « sous-développés », étonnant non et assurément révélateur de la qualité de vie de sociétés soi-disant avancées !

Je conclus en signalant un site consacré à ce sujet, qui donne notamment des conseils sur la manière de rédiger toute communication sur le suicide afin d’éviter tout effet incitatif, j’espère les avoir respectés.

http://www.ipsilon.ch/index.php?id=9&L=1

Ayons tous une sincère pensée fraternelle et émue pour ces enfants que nous n’avons pas su aimer et une action concrète envers ceux que nous pouvons sauver.

" Il y a toujours quelqu'un à qui parler ! Toujours... "

A demain...

:'(
by Manuel at 06:58:04

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