29.07.05

Vendredi 29 juillet

Conte de Provence

C’est l’histoire d’un berger orphelin des Monts de Vaucluse qui n’avait pas beaucoup fréquenté l’école. A force de travail et de détermination, même l’été il fatiguait le soleil, il avait réussi à se construire un beau cabanon au milieu de belles terres, les siennes.

Son courage avait forcé sa chance, au départ vacillante, et il avait épousé la plus belle et la plus gentille fille de la région, quel bonheur !

De cet amour lumineux sont nés plusieurs bambins, de gentils et sympathiques gaillards qui ont fait leur premiers pas sous les yeux émerveillés et pareillement complices de leurs parents et de l’astre du jour qui s’était pris d’affection pour ce bipède décidemment différent des autres.

Les années passèrent, l’aîné était devenu aussi grand que le père dont il faisait la fierté. Il fallait les voir faire le marché du samedi matin, le berger avait la tête si droite qu’il aurait pu apprendre comment défiler au plus valeureux des militaires de Salon de Provence.

Rien n’était impossible pour son fils, il le voyait médecin, avocat, ministre même !

Mais le fils, né sous un chaud soleil d’été, avait plus la bosse de la sieste que celle des mathématiques… Les discussions tournaient souvent à l’affrontement, avec le père rappelant à son rejeton qu’à son âge cela faisait déjà beaucoup d’années qu’il se levait à l’aurore, samedi et dimanche compris, pour aller travailler dans les champs jusqu’à tomber de fatigue.

Immanquablement, comme lorsque le Mistral emporte le linge à qui il manque des pincettes, une porte claquait pour marquer leur incompréhension grandissante.

Petit à petit, les orages se firent plus nombreux et le mistral plus violent jusqu’au jour où… le père dit à son aîné d’aller dans sa chambre chercher ses devoirs afin que sa femme, qui avait de l’instruction, les contrôle.

Occupé à préparer le repas du soir, ils eurent besoin d’une bonne demi-heure pour réaliser qu’il n’était pas revenu. La mère traversa la cour et alla ouvrir la porte de la chambre mais… de fils, il n’y avait pas.

La chambre était vide, le pitchoun était parti !

Revenant en courant vers son mari, elle tenta de retenir ses pleurs, sans beaucoup de succès, pour lui annoncer la terrible nouvelle. Le berger ouvrit de grands yeux, ses lèvres s’écartèrent mais aucun son n’en sortit, remplacé par de lourdes larmes qui vinrent achever leur triste course par un goût salé dans sa bouche muette.

Il attrapa sa casquette, sauta dans sa voiture et partit sur la route qu’ils avaient empruntée si souvent. Les heures succédèrent aux heures, les kilomètres aux kilomètres, les larmes aux larmes, rien… le désert, son petit avait disparu…

Gentiment, la gendarmerie tenta de lui dire « qu’à cet âge, cela arrive… », « qu’il ne faut pas s’inquiéter… », que pouvaient-ils comprendre ? Il avait perdu 2 familles, celle qu’il aurait aimé avoir petit et celle qu’il avait construite, 2 familles…

Alors, il revint chez lui, posa sa casquette et se rendit sur la terrasse. Là, où avec le pitchoun, ils regardaient les étoiles, la vallée et les hommes d’en bas. Il s’étendit sur le dos, la pierre était chaude, le ciel scintillait et il se mit à parler à voix haute…

« Mais où es-tu mon petit ? Qu’est-ce que j’ai pu faire pour que tu partes ? Je t’aime tant, je t’aime plus que je m’aime moi… Je ne sais même pas ce que je n’ai pas fait bien. Oh Mon Dieu, aide-moi, aide-moi à retrouver le petit, s’il te plaît »

En prononçant son adresse à son créateur, il avait fermé les yeux alors il ne le vit pas arriver. Lorsque sa main toucha son épaule, il sursauta autant que les jeunes veaux quand ils touchent la clôture électrique la première fois, il se redressa d’un bond et le vit…

« Merci Mon Dieu, il est revenu »

Le père et le fils tombèrent dans les bras l’un de l’autre, leurs larmes s’essuyèrent sur l’épaule de l’autre tandis que l’air de la nuit résonnait de leurs reniflements incessants.

Le fils dit : « Pardonne-moi… », le père l’interrompit « Non, pardonne-moi toi parce que si tu es parti, c’est de ma faute. Comment mon fils peut-il préférer être loin de moi alors qu’il est tout pour moi… ».

Le fils reprit « Je suis parti parce que j’ai l’impression que tu veux décider pour moi de ma vie », « Non, je veux que ta vie soit plus belle et plus facile que la mienne… ».

L’échange dura encore longtemps, sous l’œil ému de la maman qui les observait de loin.

Ils n’oublièrent jamais cet épisode de leurs destins respectifs, réalisant que si la détresse pouvait si facilement être partagée, l’amour vrai qui les unissait leur permettrait à l’avenir encore plus de dialogue, de bonheur et de compréhension…

A demain…



P.S : Bon anniversaire à l’ami Pierre, du fond du cœur ! ;)

by Manuel at 11:57:17

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