25.06.04

31 ème étape – 25 juin – Pamplona => Puente La Reina
(18,61 kilomètres et 23’866 pas – Cumulés : 788,12 kilomètres et 966’026 pas)

Mini étape particulièrement bienvenue tant, je viens seulement de le réaliser, la traversée de l’Aragòn et de la Zaragoza fut éprouvante. Ces lieux déserts, si puissants en termes d’émotion et d’environnement m’ont comme aspiré et une partie de mon fluide vital est resté entre la gare de Canfranc et Yesa…

Comment décrire ces perspectives dans lesquelles l’homme est, au mieux, invité ? Mes heures de marche en direction de ces éperons rocheux, qui semblaient toujours reculer, pouvaient pousser un esprit fertile à se poser des questions sur le statut de l’être qui l’hébergeait.

Etait-il vivant, était-il mort, était-il entre deux et si oui plus près duquel ?

Pampelune m’a reconnecté avec notre monde et cette étape a balayé les dernières brumes de l’Aragòn. Riche idée que cette dernière étape décalée de Monreal à Puente La Reina pour Pampelune => Puente La Reina ! Pourquoi ?

Parce que vous connaissez sans doute : « Quand je m’analyse, je m’inquiète, il n’y a que quand je me compare que je me réjouis ! ». L’autoroute à pèlerins annoncée était bien là puis que nous en avons doublé une trentaine en moins de 20 kilomètres alors que nous n’en avions pas vu une dizaine depuis un mois sur la Voie d’Arles.

"2004, année sainte..."

Cela peut paraître prétentieux d’indiquer « doublé », c’est juste un témoignage à nos premiers 750 kilomètres et un hommage à la première étape de beaucoup d’entre eux. Ils iront mieux, non demain les pauvres, mais dans quelques jours lorsqu’ils auront digéré coups de soleil, crampes et cloques en tout genre.

Cette mini étape nous a permis d’arriver vers 12h30, de bien manger et de faire une sieste de 2 heures pour votre serviteur et de plus de 3 heures 30 pour Michael qui dort encore pendant que je rédige cette chronique. A mon réveil, je suis allé visiter Puente La Reina, notamment son église Santiago et son fameux pont.

"No comment"

Celui que nous emprunterons demain matin pour quitter cet endroit que j’avais imaginé depuis des mois comme étant le basculement entre l’avant et l’après.

"Bientôt millénaire !"

Il nous reste 670 kilomètres jusqu’à Santiago et 29 jours, le plus dur est-il accompli ? Les larmes innombrables déjà versées, les questionnements permanents, les remises en cause systématiques ont bien entamé celui qui était parti. Maria Callas que j’écoute en rédigeant pourrait témoigner de mon émotion actuelle. J’ai encore beaucoup de chemin à parcourir et tant de chance d’être si bien entouré pour espérer y parvenir.

Je comprends tout doucement les paroles de ceux « qui l’ont fait » et qui disent qu’il est très dur de marcher mais que ce n’est rien à comparer à ce qui se passe à l’intérieur ; il faut tout casser, tout détruire, tout oublier… jusqu’à ce que ce qui est incassable, indestructible et inoubliable soit là.

Sa part d’humanité, si tenue, si menue, si faible mais si vraie. Voir ce que l’on n’a jamais vu, revoir ceux que l’on ne verra jamais plus… Tout à l’heure, je n’étais pas seul dans l’église, je le sais, j’étais avec ma femme, mes enfants, ma mère et… moi.

Le petit garçon ose pleurer parce qu’il est devenu grand et que personne ne lui fera jamais plus de mal, il est à présent inaccessible, écho si lointain d’un futur antérieur. Il pleurera encore beaucoup jusqu’à Compostelle, il en a sans doute besoin pour convaincre l’adulte qu’il est devenu qu’il doit accepter de mourir… pour repartir de cet être qu’il était et qu’il n’a pu devenir.

Il me reste moins d’un mois, les derniers jours d’un condamné qui marche vers sa renaissance, le chemin derrière moi doit être humide de mes larmes…

N.B : Ce matin, j’avais très envie de parler à Alice. Au même instant, cette vierge est apparue sur ma droite derrière un bouquet d’arbres et mon portable a sonné, c’était ma chérie de début septembre qui était en ligne…

"No comment"
by Manuel at 19:45:44
Comments (1) | Trackback (0) | Pingback (0)

Adresse de trackback pour cet article:

http://blog.manuelmartin.com/htxxxsrv/trackback.php/165

Commentaires, Trackbacks, Pingbacks:

Commentaire de: nicole
"il faut tout casser, tout détruire, tout oublier"

Pour quoi ?...

Bonjour,

imaginez, juste un instant... que vous êtes un Nuage et ... naturellement, de bon coeur laissez-vous tra-verser par tous ce et tous ceux qui passent.

Qu'éprouvez-vous ?


Quel nuage êtes-vous ?

Bon courage et n'oubliez pas de boire suffisamment d'eau !

nicole
27.06.04 @ 03:54

Laisser un commentaire:


Votre adresse email ne sera pas affichée sur ce site.

Votre URL sera affichée.

Balises XHTML autorisées: <a, strong, em, b, i, del, ins, dfn, code, q, samp, kdb, var, cite, abbr, acronym, sub, sup, dl, ul, ol, li, p, br, bdo, dt, dd>
Les URLs, adresses email, AIM et ICQ seront converties automatiquement.
Options:
(Les retours à la ligne deviennent des <br />)
(Placer des cookies pour le nom, l'email & l'url)

Blogs à lire
Continuum    Maxence
archives
Octobre 2004 (1)
Août 2004 (5)
Juillet 2004 (32)
Juin 2004 (34)
Mai 2004 (31)
Avril 2004 (30)
Mars 2004 (31)
Février 2004 (14)
Divers
S'identifier...